C’est plutôt l’État guinéen composé d’acteurs étatiques antidémocratiques qui ont ôté au régime multipartite sa vraie caractéristique.
C’est-a-dire celle offrant aux électeurs la possibilité de voter pour les candidats dont les idées sont les plus proches de leurs convictions.
Pourquoi ?
Depuis l’avènement du multipartisme en Guinée au début des années 90, c’est l’effet ethnie, clan, communauté, région qui impactent le plus souvent le choix des électeurs.
L’oligarchie guinéenne fait non seulement usage de la partitocratie mais aussi et surtout de l’ethnocentrisme politique pour aller à la conquête du pouvoir.
Les électeurs guinéens étant en manque de culture politique se laissent aussi prendre inconsciemment dans ce jeu sinistre organisé par l’oligarchie guinéenne qui fragilise les fondements de la société guinéenne.
La partitocratie étant une forme de mainmise des partis politiques sur l’ensemble de la vie politique, sociale, culturelle du pays, entrave énormément à la consolidation démocratique en Guinée.
Car elle favorise la naissance d’une nouvelle classe de privilégiés, une forme d’oligarchie concentrant les pouvoirs d’une part.
Et d’autre part dans ces partis politiques les fonctions de décision et de contrôle se trouvent alors confondues entre les mains des dirigeants.
L’ethnicité un autre facteur de blocage
Parlant de l’ethnicité qui est devenue l’instrument de manipulation des partis politiques guinéens sans exception, il est l’une des causes principales du retard de la Guinée.
Car dans un pays comme la Guinée, à partir du moment où les partis politiques font le choix de se former, de cristalliser leur base électorale autour de l’ethnocentrisme politique, le multipartisme se déforme.
Les élections deviennent dans ce cas des simples exercices permettant de mesurer la dimension démographique d’une ethnie, autrement dit une sorte de recensement démographique.
Cet état de fait nuit non seulement au déroulement des élections compétitives, mais rend difficile l’acceptation mutuelle et la consolidation démocratique.
Par conséquent l’alternance démocratique qui est considérée comme étant la respiration au sein d’une démocratie multipartite, sera sans doute asphyxiée et provoquera sa mort certaine par la violence sociale ou par un coup de force majeur.
Et c’est ce qui arriva le 05 septembre 2021
Ces partis politiques caractérisés par la partitocratie et l’ethnicité dérivent souvent vers la pensée unique avec l’apparition de partis politiques forts empêchant le développement de partis nouveaux ou contestataires.
Pour les adeptes de l’ethnicité, ton patronyme, ton clan, ton ethnie déterminent ton appartenance politique, tes convictions, tes choix politiques.
Et pour eux, l’ethnicité, le régionalisme, le clanisme sont les questions autour desquelles le débat politique doit être cristallisé.
Ce ne sont pourtant que des armes forgées et instrumentalisées par les prétendants présidentiels et leurs clans respectifs dans leur lutte acharnée pour le pouvoir.
C’est pour toutes ces raisons que la mort certaine de l’alternance démocratique en Guinée est depuis 1990 assurée.
On a comme l’impression que la cristallisation du débat politique sur l’ethnicité arrange beaucoup de responsables politiques dans ce pays, surtout ceux qui sont au pouvoir à l’image de l’actuel Chef de la junte militaire guinéenne Mamady Doumbouya.
Ils s’appuient, se nourrissent d’elle, de ses tensions ou de ses attentes ou aspirations pour conduire leurs actions.
Et parfois même, ils la modèlent, la manipulent, la précèdent même dans la haine.
Les dignitaires du régime déchus, complices des derniers escalades qu’ont connu le pays, recyclés par le président Colonel Mamady Doumbouya, donc dédouanés de toute responsabilité en savent quelque chose.
Juste une spécificité guinéenne ?
Et ce sont ces négativités de ces gens qui ont séduit Mamady Doumbouya pour l’emmener à être le parrain de l’ethnicité au sein de l’administration guinéenne, désigné pourtant porteur du changement et pourquoi?
En somme, ce n’est pas le multipartisme qui pose problème, mais plutôt les hommes et femmes politiques guinéens sans conviction.
C’est à dire ceux-là même qui font de la politique juste pour des raisons ethnicistes, claniques, fonctionnelles et participent ainsi à la déconstruction de la démocratie.
Aissatou Cherif Baldé