Nous avons tous cru que le coup d’État militaire du 05 septembre 2021 allait marquer le début d’une ère nouvelle.
Et que cette date allait surtout marquer la fin d’une politique fondée sur la division et l’ethnicité.
On a surtout voulu croire que l’actuel chef de la junte militaire, Mamady Doumbouya étant lui-même marié à une française, allait exhorter les guinéens à se débarrasser de ce fardeau aliénant source du retard de la Guinée.
Plus le temps passe, plus on se rend compte que Mamady Doumbouya est plus que jamais l’un des artisans de l’ethnisme politique. Il en a fait son instrument politique favori.
Pour le comprendre, il suffit de jeter un simple regard sur ses agissements et surtout sur ses nominations ethnicistes au sein de l’administration guinéenne.
On se rendra très vite compte que le putschiste Mamady Doumbouya a fait le choix de façonner les distinctions ethniques au sein de la société guinéenne pour le contrôle suprême de l’État.
Il veut à travers de telles nominations faire semblant d’accorder la priorité à l’intérêt de son ethnie d’appartenance et pourtant c’est irrémédiablement faux.
En analysant la situation en profondeur, on comprendra qu’il s’agit tout simplement de la manipulation, de la diabolisation de l’autre, de la fourberie et de la duperie propre aux hommes politiques sans ambitions réelles pour leur pays.
C’est l’œuvre des adeptes du pouvoir des pires, une politique perfide conçue pour le contrôle suprême de l’État et de ses ressources pour assurer le bien être d’un petit groupe factionnel, ethniciste.
La diabolisation, l’exclusion de l’autre étant propre à l’ethnicité et inhérents au mode de fonctionnement de l’État depuis l’indépendance, Mamady Doumbouya s’en sert aussi pour assurer la pérennité de son pouvoir.
Le terme “ethnie”, une invention du pouvoir colonial
En effet, le mot « ethnie » qui est entré au dictionnaire français vers 1930 est une pure invention du pouvoir colonial en Afrique pour le contrôle et l’aliénation du colonisé.
Et pour les occidentaux « Ce mot désigne un ensemble humain rassemblé par une communauté de langue et de culture mais qui, s’il a une existence territoriale, n’a pas d’existence politique, comme dans « peuple », dégradé en « peuplade », ou « nation ».
Il a servi en fait à désigner les « peuples inférieurs » étudiés par la science occidentale ».
Et cette terminologie a pour ce faire beaucoup en commun avec le racisme puisqu’elle constitue aussi une forme d’exclusion ou une diabolisation de l’autre.
Cependant, l’ethnisme politique n’a eu que des conséquences désastreuses pour l’Afrique.
Importé par exemple au Rwanda au temps colonial, divisant un même peuple avec une même identité, langue et territoire, il s’est transformé en un conflit ayant conduit à l’horreur de 1994.
Pourtant dans le contexte sociopolitique et historique africain, cette diabolisation ou exclusion de l’autre en Afrique et en Guinée sous l’influence des idéologues de la
colonisation, disciples de Gobineau, Hegel, Karl Marx en racisme à fondement physique, stature et autres doivent y être bannies.
Mais Mamady Doumbouya et son clan factionnel, clanique, ethniciste ont désormais un autre agenda.
Et c’est pourquoi il leur est impossible d’emmener les guinéens à comprendre qu’«ethnicisme» est le fait de parler une langue commune, de partager certains usages et des souvenirs historiques.
En se basant donc sur cette définition, nos différences ne devraient pas être source du retard de la Guinée.
Car de nos différences doivent naître impérativement notre force.
Un fléau prédominant dans la société guinéenne à caractère multiple
Ce fléau prédominant aujourd’hui dans la société guinéenne semble être alimenté par plusieurs facteurs.
- Le leadership politique à la tête de la Guinée a toujours été lamentable. Le cas de l’actuel chef de la junte militaire guinéenne est un exemple palpable, car il est devenu en seulement deux ans le parrain de l’ethnicité en Guinée.
- Le second facteur encourageant ce phénomène est le fait qu’il y ait un sentiment qui s’est installé que pour réussir, que ce soit pour un emploi ou un appel d’offres dans le secteur public ou privé, l’élément déterminant est qui l’on connaît, souvent basé sur l’ethnie ou la région plus que ses propres compétences et potentiels.
- Le troisième facteur est lié au fait que la Guinée à l’image de beaucoup d’autres pays africains semble être devenue une société basée sur le patronage.
Ce qui alimente l’ethnocentrisme politique plutôt qu’une société basée sur le mérite.
Les cadres des partis politiques au pouvoir pour l’emploi ces dernières années ont été utilisés à des fins opportunistes, ethnicistes ou de factions.
Le régime actuel actuel et tout comme les régimes précédents n’ont le plus souvent employé
pour des positions clés au niveau gouvernemental et dans les grandes entreprises, que des amis et des alliés provenant de leur propre région ou communauté ethnique, plutôt que des personnes selon leurs talents et compétences.
Les nominations à L’ARPT (Autorité de Régulation des Postes et Télécommunications) illustrent cet état de fait.
L’ethnisme politique n’a permis qu’à une petite faction de profiter des richesses du pays
L’ethnisme politique, cette fatalité exorcisée existant depuis 1958 aux conséquences pernicieuses sur la santé de la société guinéenne qui persiste et se pérennise encore aujourd’hui au sein de la société guinéenne n’a permis pourtant qu’à une petite faction de profiter des richesses du pays.
Et il risque de perdurer, car les adeptes de ce fléau très nombreux au sein de l’appareil d’État empêchent tout changement positif pouvant faire émerger la Guinée au profit de la population sans exception.
Or aucun gouvernement de ce monde basé sur l’ethnie, la région ou une faction politique ne peut être l’œuvre d’une prospérité durable, inclusive.
Le contrat social que les acteurs étatiques doivent avoir avec le peuple de Guinée ne doit pas faire que quelques heureux ethniques. Et chacun dans la société guinéenne doit être protégé et bénéficiaire de la prospérité de l’État guinéen quelque soit son affiliation ethnique ou politique.
guinéen quelque soit son affiliation ethnique ou politique.
On peut pourtant y remédier
Pour ce faire, il suffit de se pencher sur le renouvellement rapide des générations porteurs de nouveaux questionnements capables de susciter des brassages de populations, faits de rencontres et d’alliances.
Ces nouvelles générations, si elles sont bien encadrées peuvent empêcher que l’appartenance ethnique, souvent complexe, soit réduite à une identité «originelle» simpliste et instrumentalisée par une faction politique à coup de discriminations, voire d’exclusions.
Mais Mamady Doumbouya fait partie de cette catégorie de personnes pour lesquelles l’ethnocentrisme politique se lit très souvent dans les mentalités.
À travers elles, elles se croient supérieures aux autres. D’où la nécessité de donner la priorité à son ethnie, son clan dans ses différentes nominations.
Le mode de fonctionnement du régime actuel et le débat politique dans notre pays en font foi.
Certes, ils sont conscients de la dangerosité de ce phénomène qui peut donner libre cours à des violences interethniques destructrices. Mais il le préfère tout de même pour des raisons égoïstes et égotiques.
Il est impératif de chercher un moyen d’élimination de cette fatalité exorcisée qui freine depuis 65 ans le développement de la Guinée.
En commençant d’abord par renforcer les organisations institutionnelles et constitutionnelles en termes d’expertises en vue de promouvoir la bonne gouvernance.
Les médias ont également un rôle important à jouer dans la conscientisation des populations en ce qui concerne le changement de mentalité sur cette question.
Et ce processus d’élimination ne pouvant être que l’œuvre des Hommes politiques capables de songer à l’intérêt des prochaines générations avec une capacité et faculté intellectuelle de s’élever au-dessus des divisions partisanes, ethniciste et claniques pour rechercher le bien commun, ne peut être enclenché par Mamady Doumbouya.
Car il demeure par essence aujourd’hui l’artisan du divisionnisme et de l’ethnisme politique, cette fatalité exorcisée.
Aissatou Chérif Baldé.